Culture

Laissez-vous émouvoir par le portrait d’une femme plus qu’au bord de la crise de nerf avec la Fille de Joyce d’Annabel Abbs

La Fille de Joyce d'Annabel Abbs. Éditions Hervé Chopin. Photo: Philippe Lim
La Fille de Joyce d’Annabel Abbs. Éditions Hervé Chopin. Photo: Philippe Lim

Nous assistons à la grandeur et à la décadence d’une jeune fille trop sensible brisée par la vie. Lucia Joyce porte le poids d’un nom celui de son père James Joyce.

On découvre Lucia à son zénith en 1929. Elle est alors une étoile montante de la danse contemporaine à Paris. Puis vient la chute en 1934, brisée la fille de Joyce passe le reste de sa vie dans des asiles psychiatriques. Lucia Joyce la fille de l’illustre James Joyce est peu connue. Elle reste une énigme. Qui est-elle vraiment ?

Émouvant. Captivant. Déstabilisant. Voici les termes qui caractérisent le mieux La Fille de Joyce d’Annabel Abbs. Ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin est inspiré tout au moins en partie d’une histoire vraie. « La Fille de Joyce est le récit émouvant de la vie de Lucia Joyce artiste sans œuvre ». Brisée par la vie, l’amour possessif d’un père dont elle est dans l’ombre. Lucia Joyce fut toujours considérée comme La Fille de Joyce et ce peu importe ce qu’elle fait. Lucia est aussi « le premier martyr de la psychanalyse ».

Nous devons ce portrait de femme à Annabel Abbs. Auparavant elle avait réalisé celui de Frieda toujours aux Éditions Hervé Chopin. Il s’agit d’un autre récit des plus émouvant. Celui-ci nous entraîne à suivre les pas d’une autre femme brisée.

Dans La Fille de Joyce, Annabel Abbs donne la parole à Lucia Joyce. Ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin est rédigé à la première personne du singulier. Nous avons accès aux pensées de la Fille de Joyce. D’un côté le récit se rapporte au présent et à la psychanalyse que Lucia suit. De l’autre, il nous entraîne dans le passé à travers ce qui ressemblent à des Flashbacks. Ceux-ci donnent corps aux écrits de Lucia.

L’intrigue de ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin est à la fois captivante et émouvante. Nous ne pouvons que ressentir de l’empathie pour cette jeune femme. Une partie du poids qui pèse lourdement sur ses épaules est d’être pour beaucoup voire uniquement La Fille de Joyce et rien d’autre.

Tout commence dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin en 1934. Ce qui correspond ici au présent. Lucia va entamer une psychanalyse avec le docteur Jung à la demande de son père. C’est la première fois qu’elle consent à parler. Lucia n’en est pas à sa première thérapie.

Nous la découvrons dans un premier temps, mal à l’aise, dévorée de l’intérieur par un secret un drame que le docteur Jung va tenter de mettre à jour. Afin de faire progresser plus vite la thérapie, il lui conseille de rédiger ses mémoires. La Fille de Joyce d’Annabel Abbs nous entraîne ensuite dans le passé.

Nous sommes projetés dans ses mémoires. Plus précisément en 1928. A cette époque la jeune femme pensait avoir toute la vie devant elle. « Ces jours heureux étaient étincelants de promesses pour Lucia Joyce ». Elle était alors encensée pour son talent de danseuse. Lucia était alors éprise du compositeur Émile Fernandez. La jeune femme n’ose pas parler de leur relation avec ses parents.

Comme nous aurons l’occasion de le constater dans ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin, les parents de Lucia sont des plus vieux jeux. En regard de la vie dissolue des danseuses à Paris sa mère s’écrit « ça ne se passe pas comme ça en Irlande ».

Son père l’illustre James Joyce dont le surnom est Babbo se montre tout au long de La Fille de Joyce d’Annabel Abbs des plus possessif avec elle. Il la considère comme la muse, la source d’inspiration de son roman. Alors que son père semble tout au moins dans un premier temps l’encourager à pratiquer la danse. Il veut célébrer son succès. Sa mère est pour sa part clairement contre l’idée. Pour sa mère les danseuses ont un mode de vie dissolue. Elle les compare même à des catins.

Tout au long de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin, la mère de Lucia nous apparaît dure, injuste, des plus sévère à l’encontre de sa fille. Cependant elle n’est pourtant pas dénuée d’émotion. Tout comme la majorité des autres personnages, la mère de Lucia s’avère être des plus complexe.

Dans La Fille de Joyce d’Annabel Abbs, la jeune femme nous apparaît comme étant des plus sensible voire fragile. Déstabilisée et blessée par l’attitude de sa mère, elle s’exclame « ne pouvait-elle pas être pour une fois contente pour moi ? ». Face à l’attitude souvent hostile de sa mère, Lucia vient à se demander si « sa mère n’est pas jalouse d’elle ».

Nous aurons l’occasion de voir dans La Fille de Joyce d’Annabel Abbs la chute de cette jeune femme sensible. Sa famille est étouffante, oppressante. Un secret, un drame se cache en leur sein. Peu à peu il va empoisonner leur relation et l’esprit de Lucia.

Auparavant Lucia et son frère étaient très proches, puis tout a changé. Un écart s’est creusé entre eux et semble n’avoir de cesse de s’élargir. Giorgio apparaît très clairement comme le chouchou de leur mère. Pour le plus grand malheur de cette dernière, il va aller contre ses principes et s’affranchir de l’étau de cette famille.

On peut noter dans ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin une nette opposition entre l’attitude des parents envers Giorgio et Lucia. Leurs parents sont mal alaise à l’idée que leur fille se produise en public. Ils ont un côté vieux jeux. Ainsi Lucia observe « je m’aperçois qu’ils n’aiment pas que je dans en public, j’ai l’impression que cela leur fait honte ». Paradoxalement ils adorent que Giorgio chante en public et l’encourage dans cette voie.

De même Joyce conseil à sa fille d’abandonner la danse et de se consacrer à la reliure. Ce poste étant idéal pour une femme déterminée à exercer un métier. Lucia fait une amère constatation et ce ne sera pas la dernière, ni sa seule désillusion malheureusement.

Cette dernière est relative à l’amour possessif voire égoïste de son père. « Il ne voulait pas que je danse pour quelqu’un d’autre que lui. Voilà pourquoi il veut que je danse à la maison et pas sur scène. Il me veut pour lui seul ». Dans La Fille de Joyce d’Annabel Abbs, un sentiment d’oppression, d’inconfort, une tension sous-tendent cette famille. Le travail de James Joyce rythme leur vie, tout tourne autour. Le reste est secondaire.

Nous assistons ensuite à un moment décisif de ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin. Le bonheur, la vie de Lucia va être chamboulée par une rencontre. « Et ce fut à ce moment-là que je le vis. Regardant à travers la fenêtre très proche le nez touchant presque la vitre ». Les yeux vifs, le regard curieux de cet homme sont fixés sur son père et non sur elle. Cependant selon, Lucia quand leurs yeux se sont croisés ça a été le coup de foudre. Pour Lucia « c’était le commencement ».

Tout au long de La Fille de Joyce d’Annabel Abbs, cette dernière se révélera être un personnage attachant, émouvant. Elle est des plus touchante de par sa naïveté, son côté fleur bleue. Lucia va aller de désillusion en désillusion ce qui va profondément la marquer, la blesser de façon irrémédiable. La Fille de Joyce va se perdre.

Nous apprenons dans ce passage de ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin que la jeune femme a des prémonitions. Son père James Joyce et son amie Kitten croient en son pouvoir divinatoire. Ils l’encouragent tous deux dans ses extravagances, sa douce folie. Alors que sa mère reste sceptique. Son père la surnomme même Cassandre.

Un peu plus tard, Lucia va retrouver pour sa plus grande surprise le jeune homme dans le bureau de son père. Il lui fait la lecture et l’aide dans son travail. Cela est dû à la vue déclinante de Joyce. Nous découvrirons qu’il s’agit de l’illustre Sam Beckett à l’aube de sa gloire.

Toujours illusionnée Lucia à la sensation « qu’un frisson passe entre nous ». Elle ressent une vive émotion. Pour La Fille de Joyce c’est une certitude « Mr Beckett m’était destiné ? Ma vie était-elle intimement liée à la sienne », « Mme Beckett ». Comme souvent dans ce roman biographique d’Annabel Abbs, Lucia nous apparaît extatique, exaltée à la limite parfois de la frénésie, trop émotive. Ils vont être amenés à souvent se côtoyer.

Pour elle tout au moins au début de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin « danser était la seule solution quoique la vie nous réserve, nous devons continuer à danser ». Malheureusement pour Lucia, elle va se perdre et oublier cette philosophie. Cela va entraîner sa perte et la mener vers la folie.

Nous sommes ensuite ramenés au présent et à la réalité. Comme souvent dans La Fille de Joyce d’Annabel Abbs nous quittons les souvenirs de Lucia pour revenir à sa psychanalyse. Durant ce passage, elle nous apparaît déboussolé. Le docteur Jung l’encourage « vous faites de grands progrès Melle Joyce, mais ce n’est que le début ».

Cette dernière admet « que quand je me mets à écrire, je me souviens de tout. L’obscurité se dissout et c’est comme si tout était arrivé hier ». Il en va de même pour nous, à travers ses mémoires, sa vie et son passé nous donnent l’impression de se dérouler devant nos yeux.

Comme cela sera souvent le cas dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin le docteur Jung l’interroge sur son enfance. Il veut découvrir les racines du mal qui empoisse l’esprit de Lucia. De même le docteur Jung s’interroge sur les raisons pour lesquelles elle n’a jamais quitté son foyer.

Même maintenant alors que Lucia est au sanatorium son père n’est pas loin. Malgré les instructions du docteur Jung, il refuse de quitter la Suisse et de s’éloigner de sa fille. Durant sa psychanalyse elle est nue sous son manteau, ce qui pour sa mère est le comble de l’indécence. Lucia semble dans ce sens se rebeller.

La jeune femme dans ce roman biographique proposé par les Éditions Hervé Chopin va revoir ses objectifs. Dont pour la danse qui a pourtant une grande importance dans sa vie.  Tout au long de La Fille de Joyce d’Annabel Abbs, Lucia va être amené à faire des choix décisifs. Cependant ils sont à double tranchant et vont la mener à sa perte.

Son talent est reconnu par une grande danseuse Madika. Cette dernière séduite par sa danse lui propose de l’entraîner. Pour cela Lucia va devoir dans un premier temps faire du classique. Son amie Kitten voit ça d’un mauvais œil, car cela détourne Lucia de la danse moderne. Kitten fait remarquer à Lucia non sans raison qu’elle est trop âgée et surtout qu’elle va devoir s’entraîner durement.

De plus son amie la met en garde « c’est très différent » de ce qu’elle à l’habitude de danser. Lucia comme souvent dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin s’illusionne et est sur un petit nuage. La femme de Scott Filzgerald suit le même cours. Elle ne tient donc pas compte des mises en garde de son amie.

La Fille de Joyce d’Annabel Abbs se lit facilement. On y suit avec passion la vie de Lucia Joyce qui gravite dans l’ombre de son père. Ce dernier est omniprésent et des plus possessif. « Il compte sur moi », « j’étais sa muse, il avait besoin de moi, car j’étais son inspiration ».

Peu à peu Lucia s’efface semble s’oublier. Confronté à de multiples trahisons, désillusions, trop enthousiaste, elle n’en est que plus brisée. Ce n’est pas la première thérapie que Lucia suit, cependant le Docteur Jung est optimiste il va la soigner.

Annabel Abbs joue avec les attentes du public en multipliant les pistes. Il vous faudra attendre la fin pour connaître le lourd secret qui oppresse et empoissonne Lucia. On suit avec passion l’intrigue ce roman biographique. Il nous livre sans filtre le portrait de la Fille de Joyce ainsi que celui de ceux et celles qui l’entourent. Nous les découvrons tout comme l’intrigue à travers les yeux de cette dernière. Tous sont complexes voire attachant

Faites connaissance avec la touchante Fille de Joyce à travers le portrait émouvant que lui consacre Annabell Abbs

La Fille de Joyce d’Annabel Abbs. Éditions Hervé Chopin. Prix : 21 euros

Pour plus d’information : https://www.hc-editions.com/

Rédactrice freelance, Pigiste

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