Culture

Apprenez que le mal peut avoir un visage humain dans Lancaster de Michel Moatti

Lancaster de Michel Moatti. Editions Hervé Chopin. Photo: Philippe Lim
Lancaster de Michel Moatti. Editions Hervé Chopin. Photo: Philippe Lim

Lancaster Pennsylvanie au cœur du pays Amish est frappé d’effroi face à un crime insoutenable et à ses auteurs. Connie 18 ans est arrêtée pour l’assassinat effroyable d’une de ses camarades de classe. Aidée de son petit ami Tarabont 17 ans, elle va commettre un crime abject. Connie n’éprouve pas de remords bien au contraire.

Dix ans plus tard Connie attend toujours dans le couloir de la mort son exécution. L’enquête sur ce meurtre va montrer que Lancaster ville d’apparence tranquille cache de sombres secrets.

Captivant. Choquant. Intriguant. Voici les termes qui caractérisent le mieux Lancaster de Michel Moatti. Ce dernier confirme son statut de maître du thriller. Ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin nous entraîne dans une intrigue captivante. Elle nous est livrée à travers plusieurs points de vue.

Nous sommes conviés dans un premier temps à rencontrer l’un des principaux acteurs de ce drame. Ainsi nous nous trouvons dans le woman death row de la prison de haute sécurité de Muncy. Comme nous aurons l’occasion de nous en rendre compte tout au long de Lancaster de Michel Moatti la chronologie est mise à mal. De plus les titres des différents chapitres ont été choisis avec soin dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin. Ils sonnent comme des phrases d’accroche qui mettent en avant un élément.

Dans un premier temps, nous nous retrouvons de nos jours, plus précisément le dimanche 7 mai 2023. Il s’agit du point de vue de Connie. Celle-ci commence son récit voire son témoignage « J’aimerai tellement vous dire le fond des choses sans rien retenir sans mentir. Dire comment tout s’est passé et il y a onze ans. C’est simple, mais à la fois compliqué ». Tout d’abord ce sont les paroles d’une chanson qui lui reviennent en mémoire. Celles-ci la « projettent comme une poussière dans le passé ».

Durant ce passage de Lancaster de Michel Moatti on a l’impression que Connie n’est plus la même qu’avant. On aura l’occasion de nous en rendre compte durant notre lecture de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin. Contrairement à auparavant, elle semble éprouver des remords. Cependant au regard de la suite de Lancaster de Michel Moatti, on peut aussi en douter.

Ainsi après 11 années d’incarcération Connie déclare « (…) Les flics et les juges finissent tôt ou tard par rentrer chez eux et m’oublier. Mais les souvenirs ne m’oublient pas ». S’ensuit dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin à une succession de retours en arrière, sorte de flashback.

« Pourtant tout avait semblé aller si bien. Il y avait le Job Corps et cette fichue migraine et ces cauchemars et toutes ces conneries autour de moi. Ginger McIntyre si vous voyez ce que je veux dire et les autres. Bête comme leur pied. C’est comme si j’étais la seule fille à peu près censée de tout le bahut. Mais il y avait Tarabont ». Puis elle revient sur le manque de cohérence de son témoignage « je déballe tout en vrac parce que c’est comme ça que ça marche ».

Le passage suivant de Lancaster de Michel Moatti nous entraîne en 2012 juste avant le drame. Dans cette section le traquenard, la nuit du drame nous sont racontés. Nous avons accès aux pensées de Connie.

Son acte semble avoir été prémédité, fait de sang-froid. Ainsi Carole la suivait confiante ce soir-là. « Tandis que Connie la regardait de biais. A chaque fois elle la détestait un peu plus. Cette pute. Cette sale pute (…). Tu vas mourir ici dans ce bout minable de Cliffside Drive. Mais elle ne lui avait pas dit de suite ».

Dans ce passage de Lancaster de Michel Moatti nous sommes les témoins impuissants du drame qui se joue. Carol a été manipulée. Peu à peu, le piège se referme sur elle. Tout au long de ce thriller proposé par les Éditions Hervé Chopin on peut noter le brio de l’auteur. Ainsi les courts chapitres sont composés de phases courtes incisives, visuelles. Elles nous projettent au cœur de l’intrigue et captivent notre attention.

De son côté Tarabont semble empli de doutes. Son attitude s’oppose à celle de Connie qui a « déjà basculé ». Ainsi « des remords elle n’en a aucun ». Bien au contraire une fois l’horreur accomplie « l’adrénaline s’évacuait doucement et son excitation retombait ».

Ses observations sont froides limites monstrueuses. « Elle pensa au corps allongé dans la pente. Là où ils l’avaient abandonné. Une biche ensanglantée recroquevillée sur elle-même. Les pattes disloquées par la chute (…). Elle ne se laisse pas gagner par la culpabilité ». Connie déshumanise sa victime. Elle avait été interrogée des dizaines de fois sur les raisons de son acte. Celui-ci est qualifié par les journaux de crime « terrible », « spectaculaire, horrible ».

L’enquête au cœur de ce thriller proposé par les Éditions Hervé Chopin est des plus pointilleuse. Elle s’intéresse autant à l’avant au pendant qu’à l’après de ce crime effroyable pour tenter de le décrypter. Ainsi « l’après avait commencé au moment où Tarabont s’était retourné. Il avait regardé Connie s’éloigner ».

Tarabont semble éprouver des remords, être hanté par cette nuit d’horreur. « Les images revenaient. Le corps de Carol. Le bloc. Le sang. Trop de sang. Cette fille était remplie de sang ». Mais aussi « l’après commence au moment où l’on souhaite retourner en arrière et avoir encore une occasion de changer les choses. Il commence quand on sait que c’est déjà trop tard et que les aiguilles ne remonteront jamais sur le cadran de la montre ». Il est trop tard pour les remords enfin pour ceux qui en éprouvent tant le crime est d’une violence insoutenable.

Cependant « l’après commence aussi pour tous les autres dont il va être question (…) à l’instant où il faut exprimer ce qui s’est passé en expliquer le comment et surtout dénouer le pourquoi. Les juges, les policiers et les journalistes appellent cela les raisons. Des raisons il y en avait aussi beaucoup quelques-unes sont abordées dans l’histoire qui commence ici ».

C’est à ce moment précis de cette histoire que tout bascule. Car oui il s’agit bien d’un récit fictif . L’auteur c’est inspiré de plusieurs faits divers réels. Cependant Lancaster de Michel Moatti est un thriller. Celui-ci nous fait basculer au cœur de l’enquête, du drame, de cette sinistre histoire. Celle-ci est décryptée en détails sans concession.

Dans un premier temps dans Lancaster de Michel Moatti, le lieu voire le cadre est placé dans un style toujours des plus visuel. Ainsi nous sommes conviés à pénétrer au sein du Job Corps. Connie y a été envoyée par sa mère et l’un de son énième beau-père.

Il s’agit d’une sanction pour ses études médiocres au collège, ponctuées d’avertissements et de renvois. Ceux-ci étaient dus entre autres à des actes de violence à l’encontre de ses camarades. Pour elle c’est aussi un éloignement de sa famille.

Connie nous apparaît tout de suite comme une fille à problèmes, une rebelle. Le Job Corps est une sorte de prison avec la possibilité de sortir un week-end sur deux. Il y a un couvre-feu. « Après 21h, plus question pour les étudiantes de quitter l’enceinte. Cependant Connie s’en fichait elle faisait le mur ». Elle est en butte à l’hostilité de ses camarades de chambre dont de Ginger McIntyre. Une routine monotonie s’installe jusqu’à sa rencontre avec Tarabont.

Lancaster de Michel Moatti nous livre l’intrigue à travers plusieurs points de vue. Plusieurs intrigues semblent se dérouler. Cependant tout est indubitablement lié. Cette ville bien tranquille cache de sombres secrets.

Nous sommes ensuite conviés à nous rendre dans la communauté de South Fertility à Lancaster. On pénètre au cœur de la communauté Amish. Nous assistons à un rassemblement.  Ils se sont coupés du monde, car « le monde extérieur est mauvais ».

Cependant malgré leur doctrine, ils ne sont pas exempts de drame et de brebis galeuses. Ainsi Vulf est confronté à ses paires. Les faits lui étant reprochés sont liés à son fils Tarabont. Il a été surpris avec une fille qui n’est pas des leurs. De plus un autre drame entache la communauté. La disparition d’une petite fille de 11 ans.

Tout au long de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin on découvre en parallèle le procès. De même que des éléments propres à celui-ci qui ponctuent l’intrigue. Ainsi une section est consacrée à « deux photos de Connie » que nous ne voyons pas.

Il s’agit des deux seules photos trouvées d’elle enfant. Ses avocats ont tenté de les utiliser durant le procès pour jouer sur l’empathie, les sentiments. Cependant en regard du crime insoutenable, ces photos n’ont pas l’effet escompté.

Lancaster de Michel Moatti est un récit fictif, mais il est traité de façon aussi méticuleuse qu’une histoire vraie. Dans un souci du détail, on trouve entre autres : des extraits de journaux,…. Ce thriller proposé par les Éditions Hervé Chopin décrypte le drame avec précision en nous en donnant plusieurs points de vue.

On a de même accès aux pensées des personnes impliquées. Peu à peu, l’horreur et le drame se tracent devant nous. Il nous est restitué sans filtre dans toute sa violence. On ne peut ressentir que de l’empathie pour la victime voire pour Tarabont.

Cependant il en va autrement pour Connie et ce bien que ses avocats entre autres lors du procès lui cherchent des circonstances atténuantes. Connie nous apparaît froide, cruelle, manipulatrice. Une section de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin s’intitule Tarabont et s’intéresse à leur relation.

Le jeune homme nous apparaît comme un adolescent rebelle en quête de liberté. Tarabont est réfractaire au culte auquel il appartient. Ainsi « Pendant l’automne 2011 juste après avoir rejoint le Job Corps Connie a rencontré Tarabont. Il avait 17 ans et disait qu’il était temps pour lui de choisir de quel côté du monde il allait vivre. Il lui a dit qu’elle allait partir avec lui ».  De même « Tarabont avait accepté l’idée qu’elle était sa petite amie. Ils avaient officialisé les choses dans la grange ».

Peu à peu un lien se tisse entre les différentes parties. Le drame insoutenable prend forme dans Lancaster de Michel Moatti. Ainsi c’était avec Connie comme on s’en doutait que Tarabont avait été surpris.

Seule Carole qui faisait elle aussi le mur était au courant de leur relation. « Au bout de deux semaines Connie tenait terriblement à lui. Elle se mit aussitôt à craindre qu’on vienne lui chiper ». Connie semble excessive dans ses sentiments : amour obsessionnel voire possessif pour Tarabont, jalousie maladive, haine exacerbée….

Peu à peu, elle a le sentiment que Carol a des vues pour lui, qu’elle tournait trop autour de lui. Connie n’y va pas par quatre chemins et lui dit sa façon de voir choses. Une chose est sûre elle ne mâche pas ses mots. « Je vais lui dire et lui dire et lui dire. Je vais tellement lui dire que sa cervelle va bouillir et se mettre à lui couler du nez et de tous ses trous de connasse ». Cela va s’avérer assez proche de la réalité.

Dans Lancaster de Michel Moatti les pensées et actions nous sont livrées sans filtre dans toutes leurs violences. Juste après dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin nous avons accès au point de vue de Tarabont.

Dans un premier temps, il reste scotché par « la voix qu’elle avait eue. Ses mots leur violence». Tarabont apparaît comme étant rebelle à la doctrine de la société Amish. Par acte de rébellion, il lit la Bible noire de Lavey et s’intéresse au satanisme. Non pas comme croyance, mais en rejet total des doctrines de sa communauté.

Tarabont se montre virulent peu charitable à leur encontre. « Ce que je crois c’est que cette bande de crétins à South Fertility ne se rendent même pas compte qu’ils sont les derniers habitants de la Planète de singes ». Selon lui « tout ce dont tu as envie tu le prends ».

Il cite l’exemple de Belinda, l’enfant suppliciée, par un homme extérieur à la communauté. Selon lui cet exemple est des plus parlant. Elle a suivi la doctrine au mot et est morte. Tarabont semble se chercher être en quête d’identité. Il aboie plus qu’il ne mord. A ce moment, Tarabont aborde rapidement le cas de Graber. Celui-ci aura son importance dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin.

Dans Lancaster de Michel Moatti peu à peu nous approchons des raisons ayant menées à ce drame insoutenable. De plus en plus, les sentiments de Connie envers Carole s’exacerbent. Elle ressent une haine viscérale pour Carole. De plus Connie est d’une jalousie maladie et est possessive envers Tarabont. Connie « ne va pas le supporter longtemps. Je vais me la faire ».

Ses propos sont d’une extrêmement violence à un degré tel que Tarabont flippe. Face à sa réaction Connie déclare « Tu n’as encore rien vu. Tu n’as rien vu du tout Tarabont ». Ses propos semblent lourds de promesses et seront malheureusement prophétiques.

Lancaster de Michel Moatti cherche les raisons de ce meurtre horrible. De même, il s’intéresse à la préméditation des faits. Ainsi concernant ces cruels propos « Des mots de fille énervée et jalouse. Rien d’autre pas vrai ? Reste le rendez-vous. Ce rendez-vous c’était le problème ».

Durant ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin Tarabont semble éprouver des remords voire être hanté par cette soirée. Le brio de Michel Moatti dans Lancaster se trouve dans les différents points de vue qui nous restitue les faits. Dont celui de la victime.

Ainsi Connie lui propose de faire la paix. D’abord méfiante, Carole se laisse séduire par les promesses d’une « paix pétard ». Ce qu’il l’a fait hésiter ce sont les menaces proférées à la pause déjeuner par Connie. Celle-ci lui avait dit qu’elle allait « lui exploser la tête et mettre à jour sa cervelle ». Cela se révélera être horriblement proche de la vérité. Connie va tenir parole.

L’intrigue de ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin nous entraîne la nuit du drame. Il s’agit du point de vue de Connie. Elle y apparaît sans cœur et fait preuve d’un effroyable sang-froid. Ainsi elle observait Carole qui se ne «se doutait de rien. Elle ne sait pas qu’elle va mourir ».

Tout au long de Lancaster de Michel Moatti on assiste à de constant allers-retours dans la chronologie. Ce thriller proposé par les Éditions Hervé Chopin est une enquête détaillée et précise sur le drame, ses raisons et ses répercussions. C’est une analyse détaillée des faits. On est happé par l’intrigue de ce « meurtre avec préméditation commis d’une manière particulièrement haineuse, atroce, cruelle, révoltante, odieuse et hideuse ».

On retrouve ainsi des portraits sans filtre des 3 personnages centraux Connie, Carole et Tarabont. Ils nous apparaissent dans toutes leurs complexités. Sans pour autant chercher réellement de circonstances atténuantes.

Tarabont ce soir-là est complice et spectateur du drame qui se déroule devant nous. Connie s’acharne sur la pauvre Carole. Elle lâche sa haine, sa colère, sa frustration sur elle d’une façon effroyable. On a accès aux différents éléments du procès dont les conclusions du légiste.

Parallèlement à cela se joue un autre drame dans Lancaster de Michel Moatti. A savoir la mort de Belinda par un Anglais. Terme désignant les non-membres de la communauté Amish de South Fertility. Selon Tarabont cela serait dû en partie à la langue. Ainsi « partout dans ce pays on parle l’anglais. Eux pour la plupart, ils s’expriment dans cette vieille langue allemande du temps de la réforme ou plus loin ». De plus « parler anglais est mal vu là-bas ». Le sentiment de sécurité au sein de la communauté est mis à mal. Ce malheur va les diviser. Le style choc, visuel, incisif de Michel Moatti restitue parfaitement la violence, l’horreur du drame.

Connie semble incarner à merveille l’idée de monstre humain. Folle de rage, elle crie tout en s’acharnant sur sa pauvre victime « mais-tu vas la fermer ta gueule. Tu vas la fermer ta sale gueule de pute. Bon Dieu Tarabont aide-moi à faire fermer sa gueule à cette pute ».

Le brio de ce thriller proposé par les Éditions Hervé Chopin c’est de donner aussi la parole au proche de la victime. Ainsi la mère de Carole va en plein milieu de la nuit réveiller sa sœur et son mari policier. Elle est hystérique et leur explique « on a tué ma pauvre petite fille. Ils ont tué Carole dans cette foutue ville de merde de Lancaster ».

S’ensuit dans Lancaster de Michel Moatti une analyse méticuleuse du drame. On va ainsi assister : à l’étude du lieu du crime, aux différents témoignages dont l’un atteindra le climax de l’horreur, mais aussi aux interrogatoires.

Dans ce livre proposé par les Éditions Hervé Chopin Connie semble toujours aussi éprise de Tarabont. Selon elle « il n’a pas à payer pour elle ». Connie assume ses actes et ne semble pas éprouver d’empathie pour sa victime voire être fière de ses actes.

Cependant Lancaster de Michel Moatti se révèle des plus complexe. De plus cette petite ville n’est au demeurant pas si tranquille que ça. Comme le dit si bien l’expression l’Homme y est un loup pour l’Homme.

Plongez au cœur d’un thriller captivant avec Lancaster de Michel Moatti

Lancaster de Michel Moatti. Éditions Hervé Chopin. Prix : 19,50€

Pour plus d’info : https://www.hc-editions.com/

Rédactrice freelance, Pigiste

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